A la vieille de la seconde guerre mondiale, l’économie du pays de Vire est largement dominée par l’agriculture. Ce territoire au bocage très dense est essentiellement composé de petites exploitations familiales qui associent l’élevage et cultures céréalières pour subsister. Les marchés hebdomadaires et les grandes foires aux bestiaux comme celle de Villers-Bocage sont les principaux lieux de rencontres de l’économie locale. Mais certaines villes comme Vire ou Condé-sur-Noireau sont, depuis le début du XIXe siècle, des cités industrielles importantes ou se côtoient usines textiles,  l’agroalimentaire (beurreries, Andouille de Vire, fromageries) et les distilleries. Le Calvados est à cette période le premier producteur de beurre en France. Le chemin de fer permet d’envoyer des produits frais à Paris (beurre, bestiaux, volailles, œufs).

| L’occupation |

Dès le début de l’occupation en juin 1940, la Basse Normandie est la région française ou se concentrent le plus de soldats allemands, environ 130 000. Le département du Calvados occupe en effet une position stratégique face au Royaume-Uni.

Le manque de produits se fait vite ressentir à cause des réquisitions abusives et des pillages des troupes allemandes. De nombreux produits de consommation courante (beurre, viande) se raréfient, certains producteurs et commerçants fuient les marchés officiels et vendent leurs denrées à des prix exorbitants. La Normandie développe un marché noir avec des régions où il n’y a aucune production agricole, notamment Paris et sa banlieue.

L’Allemagne a besoin de métaux pour alimenter ses usines d’armement. Le régime de Vichy s’engage dans une grande collecte de métaux non ferreux et se sépare d’une partie de ses statues. A ce sujet le Calvados n’est pas épargné. La statue de l’Amiral Dumont d’Urville à Condé-sur-Noireau est déboulonnée, tout comme celle de Richard-Lenoir à Villers Bocage, grand industriel manufacturier originaire d’Epinay-sur-Odon. La statue Castel à Vire échappe de peu à la fonte.

Toutes ces décisions prises par l’occupant pèsent lourdement sur la vie quotidienne et provoquent une hostilité importante envers les allemands. Émergent alors un esprit anglophile et une adhésion aux discours du Général de Gaulle.

La Résistance

Les premiers actes de résistance apparaissent tôt dans le département. Dès novembre 1940, elle est particulièrement active dans le bocage et s’accentue avec la mise en place du STO (Service du Travail Obligatoire) en février 1943. Mais c’est en 1944 que la résistance est la plus active, elle reçoit des armes et du matériel et se prépare à soutenir le Débarquement. La résistance dans le bocage virois bénéficie d’un soutien de poids : le lieutenant Jean Renaud Dandicolle, agent des services secrets britanniques, originaire de Bordeaux, eu pour mission d’organiser des parachutages d’armes et de mettre en place des maquis en prévision du Débarquement. Sous le pseudonyme de « Capitaine Jean », il effectua pendant trois mois de nombreux déplacements dans Calvados où il entra en contact avec la résistance locale. Sous sa responsabilité, plusieurs parachutages ont lieu dans le Calvados, notamment à Montchamp et Saint-Marie-Outre-l’Eau.

La résistance a payé un lourd tribut dans le secteur, en témoigne le monument à Montchamp érigé en l’honneur des 60 Résistants de l’arrondissement de Vire (Condé-sur-Noireau inclus) qui ont été fusillés ou déportés.

Crédit photo – Mairie de Valdallière

| La Libération |

Bombardements

Le Général Eisenhower nommé Suprême Commandant des Forces Expéditionnaires Alliées pour l’opération Overlord décide d’utiliser des bombardiers lourds pour soutenir les troupes terrestres avant et pendant la Libération. Pour que l’invasion soit une réussite, il faut débarquer le maximum d’hommes et de matériel et retarder l’arrivée des renforts allemands. Plusieurs villes bas-normandes sont désignés par le haut commandement comme étant des nœuds routiers à obstruer ou à détruire.  Les bombardiers lourds américains réalisent quatre missions le Jour J. La dernière opération de la journée baptisée « Royal Flush » est prévue en début de soirée vers 20h. 736 bombardiers B-17 et B-24 sont réquisitionnés.

Vire et Condé-sur-Noireau sont durement touchés mais quelques heures plus tard, les Alliés décident de recommencer, la Royal Air Force spécialisée dans les bombardements nocturnes prend le relais. Le 7 juin au matin, les populations fuient les villes défigurés vers les campagnes environnantes. Les bombardements feront 252 victimes civiles à Condé-sur-Noireau et plus de 400 pour Vire.

Entre les 11 et 15 juin 1944, une pluie de bombes s’abat sur la petite commune d’Aunay-sur-Odon, tuant 187 civils. (Promenade dans la ville d’Aunay-sur-Odon)

A la fin du mois de Juin, les alliés, ne parviennant pas à prendre Caen, lancent l’opération Epsom. Cela consiste à percer le front allemand en contournant la capitale bas normande par l’ouest tout en prenant les ponts sur la rivière Odon. Les alliés décident de bombarder Villers-Bocage afin de rendre impraticable les carrefours, obstruer les routes de gravats et éviter que les allemands bénéficient de renforts à l’ouest de Caen. Le 30 juin vers 17h, c’est 250 Lancaster qui déversent 1100 tonnes de bombes sur Villers-Bocage.

Bombardement de Villers-Bocage le 13 Juin 1944

Combats terrestres

A la mi-juin, les Alliés sont aux portes du bocage, Caumont l’Eventé est libéré le 13 juin par les troupes américaines.

Ce même jour, dans la matinée, la 7ème Division Blindée Britannique arrive à Villers-Bocage. Elle traverse le bourg sans difficultés. Par contre, dès sa sortie de Villers en direction de Caen, elle rencontre les chars Tigre de Michel Wittmann (l’as aux 119 victoires sur le front russe). Un seul est en état de se déplacer et quatre autres endommagés peuvent encore servir. Mais dès que l’alerte est donnée, huit autres chars allemands viennent à la rescousse. Toute la colonne anglaise est mitraillée et les chars britanniques demeurés dans Villers-Bocage sont détruits les uns après les autres. (Promenade dans la ville de Villers)

La Panzher Lehr Division met en échec les alliés à Tilly-sur-Seulles. La commune sera prise et reprise 23 fois par les belligérants pendant près d’un mois. Pour en savoir plus, visitez le Musée de la Bataille de Tilly.

Le front reste figé pendant plusieurs semaines… Le bocage reste inaccessible.

Fin juillet, les forces américaines perçaient en direction d’Avranches (opération Cobra), de leur côté, Anglais et Canadiens maintenaient une forte pression autour de Caen, fixant d’importantes forces allemandes. Ils décident d’attaquer ce qu’ils nomment le “ventre mou” ennemi, entre Caumont l’Eventé et Tilly-sur-Seulles.

Le 30 juillet, le Général Montgommery lance l’opération Bluecoat, pour protéger le flanc gauche américain et éviter que les allemands n’utilisent les hauteurs comme le Mont Pinçon.  La 2e Armée Britannique doit s’enfoncer dans le bocage en direction de Flers.

L’avancée est très lente car les chars ne peuvent manœuvrer dans ces chemins étroits. Ce qui fait l’identité de notre territoire devient  le cauchemar des soldats alliés. La présence de haies, caractéristiques du bocage, permettent aux Allemands de se dissimuler pour riposter, provoquant de lourdes pertes. C’est une véritable guerre de jungle.

Villers Bocage est libéré le 5 août. La prise du Mont-Pinçon fut très difficile par les Alliés à cause de ses 365 m d’altitude. Le 6 août, des chars du 13/18 Royal Hussards attaquent la montée périlleuse et parviennent à neutraliser les canons le lendemain.

Pour tout comprendre sur cette opération militaire de grande envergure, visitez le Musée de la Percée du Bocage à Saint-Martin-des-Besaces

crédit photo : musée de la percée du bocage

Vire est libérée le 8 août grâce à la prise de la cote 203, position clé de la défense allemande, située sur les hauteurs au sud de la ville. Une stèle commémorative au lieu-dit les Monts Besnard, rappelle le courage des 112 soldats américains tombés. (Promenade dans la ville de Vire)

La ville de Condé-sur-Noireau est libérée bien plus tard, le 17 août, par la 11e Division Blindée Britannique venue de Vassy.

Article publié le mardi 17 mars 2020